Suspendue de l'école en 6e année

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Une des choses que j’ai apprécié de l’obligation de rester à la maison pendant la pandémie, ce sont les moments de pause que mon cerveau a été capable de prendre.

Plus souvent qu’autrement, il m’est difficile de me rappeler comment était mon quotidien quand les difficultés du défi d’attention y faisaient la pluie et le beau temps.

Comme si une tornade avait soufflé ces souvenirs dans un autre univers pour que je sois incapable d’y accéder.

De la fois où l’éducatrice de la garderie m’a lavé la bouche avec du savon parce que mon langage était inapproprié, aux punitions les bras en croix devant toute la classe en 2e année en passant par une suspension de trois jours en 6e année, mon parcours scolaire est parsemé d’expériences pour le moins désagréables.

Des heures incalculables de retenue et un nombre record d’absences non justifiées au secondaire.

Une grande gueule qui me mettait les pieds dans les plats ou des gestes irréfléchis qui faisait qu’on me remarquait pour les mauvaises raisons, comme cette expulsion assez mémorable en secondaire 3. 

Le clown de la classe quitte le spectacle

C’était le premier cours de l’année et le professeur nous avait énuméré les règles de conduite.

La fin de la période n’a pas eu le temps d’arriver que, sans le vouloir, j’en avais déjà enfreint plusieurs.

Le prof m’a regardé par-dessus ses lunettes à la John Lennon et m’a dit: toi, je ne veux plus te voir dans ma classe.

J’ai manqué un cours, puis deux, trois, quatre et peut-être plus. J’ignore combien de temps il s’est écoulé entre le moment de l’expulsion et celui où le directeur m’a fait venir dans son bureau pour savoir pourquoi j’avais autant d’absences dans cette matière.

Facile, lui ai-je dit. Le prof m’a dit qu’il ne voulait plus me voir dans sa classe, alors j’ai arrêté d’y aller.

Je pouvais lire le découragement dans son regard et en même temps, le désarroi de ne pouvoir répondre ou argumenter.

La perception qu’on pourrait avoir de l’événement est que j’ai défié l’autorité alors que la rebelle en moi avait tout simplement obéi à la requête du professeur.

Le directeur m’a signé un billet de retour en classe au grand plaisir de mes camarades qui étaient fous de joie quand je suis revenue.

Quand les émotions créent une décharge d’impulsivité

École Marie-Victorin à Saint-Siméon dans Charlevoix, 1983. C’est ma dernière année du primaire avant le grand saut à l'école secondaire. J’ai 11 ans et, de mémoire, j’aime apprendre, donc j’aime l’école.

J’aime aussi quand mes professeurs me confient des responsabilités comme faire la distribution des berlingots de lait ou aller nettoyer les brosses à tableau.

Le machin truc qui aspire la poussière de craie n’est pas à proximité de la classe des 6e année. Si l’enseignante me confie cette tâche, c’est qu’elle me fait confiance.

Celle qui nous enseigne ce jour-là est une suppléante, je crois, et alors que je pense qu’aujourd’hui encore, j’aurai la tâche d’aller nettoyer les brosses à tableau, elle la confie à un autre élève.

Normal, elle veut offrir la chance à d’autres de donner un coup de main. Sauf que dans ma tête d’enfant de 11 ans, je ne le vois pas comme ça. Je lui demande pourquoi et sincèrement, je ne me souviens plus de la réponse ni de l’échange qui a mené à l’explosion de la fillette que je suis.

Ce qui est encore imprégné par contre, c’est ma main gauche qui monte derrière ma tête comme si j’étais lanceur à la balle-molle. La brosse à tableau est propulsée à l’autre extrémité de la classe, passant très près de heurter le visage du professeur.

Ce qui est encore vif, c’est le ressenti du moment.

30 ans plus tard, j’ai compris ce qui s’est passé ce jour-là

L’explosion n’avait rien à voir avec le fait que le professeur avait confié la tâche à un autre élève, mais avec la façon dont j’ai interprété la situation.

Je ne comprenais pas pourquoi, j’ai cru qu’elle ne me faisait plus confiance et que tout à coup, elle ne croyait pas que j’étais “assez grande et responsable” pour le faire. 

Je me suis sentie rejetée et j'avais l'impression qu’on venait de m’enlever quelque chose. 

Je trouvais ça injuste.

Et c’est le tourbillon d’émotions causé par ces ressentis que j’étais incapable de moduler qui a explosé. 

La colère, l’incompréhension, la frustration, l'injustice, le sentiment de ne pas être assez ou de ne pas être à la hauteur, etc…

Ce n’est que 30 ans plus tard, en repensant à cet événement qui m’a valu une suspension de trois jours que j’ai compris.

Après coup, je me sentais tellement mal et je regrettais sincèrement d’avoir “pété les plombs”.

À la deuxième journée, j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai passé un coup de fil à l’école pour parler à mon enseignante. 

Je me suis excusée, je lui ai dit à quel point je regrettais et que je m’ennuyais seule à la maison toute la journée.

Le lendemain, j’étais de retour en classe.

Oui, j’en ai fait voir de toutes les couleurs à ma mère, à mes professeurs et aux directions d’école! 

Sur la ligne de temps de la vie, ce sont uniquement des moments, des accros de parcours d’une enfant qui se sentait différente sans trop savoir pourquoi et sans comprendre les émotions qu’elle vivait.

Et je sais avec certitude que peu importe les complications que le défi d’attention amène dans ta vie et le chemin atypique que tu as parcouru, ça ne ne définit pas ce que tu es ou ce que tu deviens.

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